En tant que deuxième monnaie la plus échangée sur le marché des changes et deuxième monnaie de réserve la plus détenue après le dollar américain, l'euro joue un rôle important dans le commerce international. Bien que la monnaie soit utilisée par 19 pays, facilitant le commerce et les investissements entre ces derniers, certains pays d'Europe centrale n'ont pas encore adopté la monnaie unique.Au-delà de la contribution à la diversité du marché des changes, on peut se demander : quels sont ces pays et pourquoi n'utilisent-ils pas l'euro ? Examinons de plus près cinq d'entre eux : la Bulgarie, la République tchèque, la Hongrie, la Pologne et la Roumanie.
Le lev bulgare (BGN)
Bien que la Bulgarie ait exprimé sa volonté de respecter les critères de convergence et d'adopter l'euro dès son adhésion à l'Union européenne en 2007, elle utilise actuellement toujours sa propre monnaie, le lev (BGN). Toutefois, cela pourrait bientôt changer.
« La salle d'attente »
Avec la Croatie, la Bulgarie a rejoint le mécanisme de taux de change européen (MCE II) ou la « salle d'attente » de la zone euro, en 2020. Sa monnaie a été ancrée à un taux de change fixe de 1,95583 EUR/BGN par rapport à l'euro et, au cours des prochaines années, la BCE surveillera attentivement les mouvements de la monnaie. Si tout se passe comme prévu, la Bulgarie pourrait rejoindre la zone euro dès 2023, ce qui constituerait le premier élargissement de la zone euro depuis 2015, date à laquelle la Lituanie est devenue le 19e pays à adopter l'euro.
La crise financière de 1997
Après la chute du régime communiste, la Bulgarie a connu des turbulences financières qui ont mené à une période d'hyperinflation. Après plusieurs tentatives de stabilisation infructueuses, le gouvernement s’est doté d’un dispositif dit de « caisse d'émission » en 1997, fixant la valeur de la monnaie nationale par rapport au mark allemand. Toute la monnaie en circulation était garantie par la Banque nationale bulgare. La caisse d'émission est toujours en vigueur aujourd'hui et, avec l'introduction de l'euro, le lev a été rattaché à l'euro au taux de change du mark allemand par rapport à l'euro lorsque l'Allemagne a adopté la monnaie unique en 1999. En d'autres termes, cela fait 22 ans que la monnaie bulgare est liée de facto à la politique monétaire et au taux d'intérêt de la Banque centrale européenne.
Le saviez-vous ? En ancien bulgare, le mot « lev » signifiait « lion ». |
La couronne tchèque (CZK)
Comme d'autres pays de la région, la République tchèque a connu de nombreux bouleversements économiques et géopolitiques en peu de temps. Sa monnaie actuelle, la couronne, a été introduite en 1993 et tire son nom de la monnaie qui avait été introduite en 1892 et utilisée jusqu'à la dissolution de l'Empire austro-hongrois en 1918.
Forte malgré les obstacles
Sous l'Empire d’Autriche-Hongrie, les terres tchèques étaient au cœur de la croissance économique et industrielle, produisant la plupart des biens industriels de l'empire. La région a continué à jouir d'une prospérité considérable après la première guerre mondiale. A l’époque sa monnaie était même considérée comme la plus stable d'Europe. L'occupation du pays, par l'Allemagne dès 1938 puis par l'Union soviétique, ont été préjudiciables à l'économie locale qui a connu un déclin relatif.
Depuis son indépendance du bloc communiste, la libéralisation et une gestion économique saine ont permis à la République tchèque de maintenir un taux de change stable, un faible taux de chômage, une faible dette extérieure et un transfert de ses exportations de l'ancien bloc soviétique vers les pays occidentaux, et notamment l'Allemagne. Après la dissolution en 1993 de la Tchécoslovaquie en deux pays indépendants, la République tchèque et la Slovaquie, la couronne tchèque est devenue entièrement convertible en 1995. En mettant en place des politiques budgétaires strictes, en assurant la stabilité du secteur bancaire et en adoptant une attitude prudente, la République tchèque a été le premier pays post-communiste à recevoir une notation de crédit par un établissement de crédit international.
La souveraineté avant tout
Tout comme chez leurs voisins hongrois et polonais, la population de la République tchèque est opposée à l'adoption de l’euro. Selon un sondage réalisé en 2019, pas moins de 75 % des tchèques sont opposés à l'adoption de l'euro et préfèrent garder le contrôle de leur politique monétaire.
Le saviez-vous ? En 2019, la République tchèque s'est classée au 7e rang des économies les plus complexes selon l'indice de complexité économique (ICE), devant les États-Unis et la plupart des pays d'Europe occidentale. |
Le forint hongrois (HUF)
Au cours des derniers siècles, la Hongrie a connu plusieurs monnaies dont le pengő et la couronne. Adoptée en 1946, sa monnaie actuelle, le forint (HUF), était déjà la monnaie du pays de 1754 à 1892. Jusqu'en 1994, la Hongrie avait rattaché le forint à un panier de devises, dont le dollar américain et le deutsche mark. Aujourd'hui, il s'agit d'une monnaie flottante.
Il était une fois...
Si la Hongrie occupe aujourd'hui une place secondaire sur la scène internationale, n'oublions pas sa longue histoire et surtout son âge d'or : l'Empire austro-hongrois. S'étendant sur plus de mille kilomètres, de la République tchèque à la pointe de la Croatie et de l'Ukraine au nord de l'Italie, l'Europe centrale était en partie gouvernée depuis Budapest, faisant de la ville un pôle économique majeur. À l'époque, l'empire était le troisième plus grand fabricant et exportateur au monde et possédait la quatrième plus grande industrie de construction de machines. L'empire était considéré comme un pionnier de la science et de la technologie et générait un commerce international important grâce à son vaste réseau de chemins de fer.
L'effondrement de l'empire et de son union économique et monétaire à la fin de la première guerre mondiale a porté un coup sévère à la région. De nouvelles nations ont été créées, des frontières ont été érigées et des accords commerciaux se sont effondrés, ce qui a considérablement entravé la croissance économique de la Hongrie. L'histoire a tendance à se répéter. La fin de la deuxième guerre mondiale a marqué la soumission de la Hongrie à l'Union soviétique, l'unissant à nouveau, dans une certaine mesure, à ses pays voisins.
L'histoire récente de la Hongrie a renforcé un sentiment national d'autodétermination, qu'elle partage avec d'autres pays d'Europe centrale comme la République tchèque et la Pologne. Pour certains Hongrois, l'idée d'adhérer à une union économique et monétaire et de renoncer au contrôle des finances publiques rouvre de vieilles blessures...
La Hongrie, reine des exportations
Le riche passé industriel du pays se perpétue aujourd'hui et la Hongrie reste l'une des premières nations d'Europe centrale à attirer des investissements directs étrangers. Son économie orientée vers l'exportation met fortement l'accent sur le commerce extérieur et ses principaux partenaires commerciaux comprennent tous les anciens territoires austro-hongrois.
Le złoty polonais (PNL)
Bien que la Pologne ait adhéré à l'Union européenne en 2004, elle n'utilise pas actuellement l'euro, mais sa propre monnaie historique, le złoty (PNL). La monnaie polonaise que nous connaissons aujourd'hui a vu le jour en 1995 sous le régime post-communiste dans le but de relancer l'économie du pays. La monnaie est devenue convertible sur les marchés internationaux et le gouvernement a rattaché le złoty à l'euro avant de finalement laisser flotter librement la monnaie en 2000.
Un succès économique
On peut dire que l'économie de la Pologne est une réussite. Depuis que le pays a quitté le bloc communiste, son économie a connu une croissance régulière chaque année et son PIB a été multiplié par sept depuis 1990. En fait, même la récession économique de 2008 n'a pas entravé de manière significative sa croissance. Avec la chute du régime communiste, la Pologne a radicalement réorienté sa stratégie économique vers l'Ouest. Aujourd'hui, plus de 70 % de ses exportations sont destinées aux pays européens, dont 30 % à l'Allemagne, son principal partenaire commercial.
Si son économie n'a cessé de s'améliorer depuis son indépendance du bloc communiste et si la plupart de ses échanges commerciaux se font avec les pays européens, pourquoi la Pologne n'a-t-elle pas encore rejoint l'euro ?
Et puis la crise frappa…
Son objectif initial était de rejoindre la zone euro dès 2012. Le pays était loin de se douter que la crise financière de 2008 se profilait à l'horizon. Selon les statistiques économiques, la dévaluation de sa monnaie flottante a rendu les produits polonais plus compétitifs pour les acheteurs étrangers pendant la crise. Compte tenu de la situation, le gouvernement a décidé de retarder les négociations d'adhésion jusqu'à la fin de la crise mondiale. Depuis lors, cependant, les changements politiques dans le pays éloignent la Pologne d'un consensus sur la question.
Le saviez-vous ? Selon un récent rapport d'Ernst & Young, la Pologne se classe parmi les 10 destinations d'investissement les plus attrayantes en Europe. La Pologne doit encore satisfaire à deux critères de convergence : la stabilité du taux de change et les taux d'intérêt à long terme, y compris la participation au MCE II. En l'état actuel, la volatilité relative du złoty offre une marge de manœuvre considérable aux spéculateurs et rend les contraintes du MCE II d'autant plus difficiles à respecter. |
Le leu roumain (RON)
La Roumanie a rejoint l'UE en 2007, tout comme sa voisine, la Bulgarie. Pourtant, comme la Bulgarie, la Roumanie utilise encore sa monnaie nationale, le leu (RON). Aujourd'hui, la Roumanie s'efforce de respecter les critères de convergence et vise à adopter l'euro d'ici la fin de la décennie.
Lorsqu'elle faisait partie du bloc de l'Est, la Roumanie a connu une industrialisation rapide, mais la fin de la période communiste a entraîné une forte récession économique et une inflation élevée. Les privatisations et les mesures d'austérité strictes ont permis de stabiliser la monnaie. Aujourd'hui, la demande intérieure joue un rôle important dans l'économie, de même que les investissements directs étrangers, qui sont supérieurs à la moyenne de l'UE, la Roumanie étant considérée comme un pays au potentiel économique important.
L'adhésion du pays à l'Union européenne et à l'espace Schengen ont joué un rôle majeur dans le développement de ses échanges au niveau européen. Les relations économiques franco-roumaines sont particulièrement bonnes et les échanges entre les pays sont équilibrés. En fait, la France et les autres pays de l'UE, à savoir l'Allemagne, l'Italie et la Hongrie, figurent parmi les principaux partenaires commerciaux de la Roumanie.
Une destination d'investissement improbable
Parmi les héritages de la période soviétique, citons une solide infrastructure de télécommunications et un système éducatif axé sur les sciences, la technologie, l'ingénierie et les mathématiques. En conséquence, son industrie technologique a largement bénéficié de ces avantages et est actuellement en plein essor. Ses domaines d'expertise liés aux technologies de l'information comprennent la cybersécurité, les logiciels d'entreprise et les technologies financières. Le marché intérieur en pleine croissance, la main-d'œuvre jeune et diversifiée et l'adhésion à l'UE font de la Roumanie une destination prometteuse pour les investisseurs dans le secteur des technologies.
Saisir le dynamisme de la région
Il a peut-être fallu un peu de temps à certains de ces pays d'Europe centrale pour trouver leur place, mais aujourd'hui, ils rattrapent rapidement leur retard. Cette région économiquement dynamique attire les entreprises des pays de la zone euro qui cherchent à s'implanter localement. À cet égard, notre article pour réussir son développement international peut fournir des informations utiles.
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