Vers une baisse prolongée de l’EUR/ILS ?

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Au vu du succès de la campagne de vaccination israélienne, l'économie du pays risque de rebondir plus rapidement que celles de la plupart des pays de la zone euro. Au point de mener à une appréciation excessive du shekel ? Nous faisons le point sur les récentes évolutions de la paire EUR/ILS au lendemain des élections législatives israéliennes.


L'évolution de la paire euro-shekel (EUR/ILS) doit être appréhendée en termes de cycle. Depuis son point haut historique à 5,95 juste avant l’éclatement de la crise financière de 2007, la paire est entrée dans un cycle baissier de long terme. Ce dernier a été confirmé par la crise de la Covid-19. En l’espace d’un an, l’EUR/ILS a perdu près de 2,5% et évolue désormais autour de la zone des 3,90. Si on se projette sur trois ans, la baisse est encore plus importante, de l’ordre de 8%, et de près de 10% sur cinq ans.

Depuis le début de la crise actuelle, la banque centrale israélienne a mis en place une série de mesures qui visent, entre autres, à faire baisser le taux de change du shekel face à l’euro et au dollar américain. Parmi ces mesures, on compte notamment la diminution du principal taux directeur à un point bas historique de 0,1 % et le lancement d’un programme de rachat d’actifs (ou QE, pour Quantitative Easing), qui constitue la principale innovation de politique monétaire liée à la crise.

À l’instar d’une douzaine d’économies émergentes, Israël a opté pour cette mesure non conventionnelle qui, jusqu’à récemment, ne faisait partie de la panoplie monétaire que d’une poignée d’économies développées. À l’origine, le programme de rachat d’actifs israélien était doté d’une enveloppe de 50 milliards de shekels, qui s’est étoffée au cours des derniers mois (+35 milliards de shekels en octobre 2020).

 

Des mesures supplémentaires

La littérature économique montre que ce type de mesure non conventionnelle conduit à une baisse du taux de change. Le QE américain lancé dès le début de la crise financière en 2008 faisait partie des moteurs de la relance de l’activité en induisant une baisse du dollar. Toutefois, le QE a une efficacité bien moindre dans un environnement économique où de nombreux acteurs utilisent ce levier. À ce jour, plus d’une vingtaine d’économies, notamment les principales, sont engagées dans ce type de politique monétaire.

C’est pourquoi, en parallèle, la Banque d’Israël a continué ses interventions directes sur les changes. Selon les dernières données officielles, elle a racheté près de 11,7 milliards de dollars (environ 9,9 milliards d’euros) de devises sur les mois de janvier et février afin de freiner l’appréciation du shekel sur le marché des changes. Cela représente 40 % de l’enveloppe totale de 30 milliards de dollars que la banque centrale du pays envisageait de consacrer à cet objectif pour l’ensemble de l’année 2021. Il semble donc évident que l’enveloppe dévoilée ne sera pas suffisante et que la banque centrale sera contrainte d’acheter bien plus de 30 milliards de dollars de devises étrangères cette année. En effet, tous les indicateurs sont au vert pour une poursuite de la hausse de la monnaie israélienne à moyen terme.

 

Trois facteurs haussiers pour le shekel en 2021 :

  • Les rentrées d’argent liées aux exportations de gaz naturel.

  • L'excédent important du compte courant d'Israël.
    Ce chiffre a atteint un record à 20 milliards de dollars (environ 16,9 milliards d’euros) en 2020, ce qui soutient structurellement le taux de change du shekel.

  • L’excellente gestion de la campagne de vaccination.
    Cette dernière a déjà permis une réouverture économique quasi complète dans le pays alors que l’Europe se referme progressivement pour faire face à la troisième vague du virus. En Israël, la campagne de vaccination a commencé le 19 décembre dernier. Dès le 25 mars 2021, le nombre total de vaccinations administrées pour 100 personnes atteignait 114, le taux le plus élevé du monde. Par rapport au pic de mi-janvier, le nombre de décès quotidiens a diminué de 85 % et le nombre de malades critiques quotidiens de 72 %. Le volume journalier de cas de Covid-19 recensés a également chuté de 86 %. Au rythme de vaccination actuelle, Israël aura vacciné entre 70 % et 75 % de sa population (9 millions d’habitants) d’ici quelques semaines.

En raison de ces éléments, un contraste majeur entre Israël et la zone zuro devrait se manifester en points de croissance. Le rebond économique israélien devrait être de l’ordre de 7,5 % de croissance économique cette année, contre 4,1 % en zone euro (selon les prévisions les plus optimistes). Cela induira une probable hausse de l’excédent du compte courant israélien, soutenant ainsi davantage le shekel.

 

Élections législatives : un impact limité

Au lendemain de ses quatrièmes élections législatives en deux ans, les tractations se poursuivent pour former un gouvernement en Israël, mais ces remous politiques ne devraient pas constituer un facteur différenciant pour la paire EUR/ILS. En effet, la paire réagit assez peu aux agitations relativement fréquentes de la politique israélienne. En outre, les inquiétudes concernant un revirement de politique monétaire (une éventuelle hausse des taux afin de faire face à un regain d’inflation) ne sont pas fondées.

Le gouverneur de la Banque d’Israël a clairement exclu ce scénario il y a quelques semaines, réaffirmant que la politique monétaire continuera sur la même lancée. Dans ces conditions, tout est en place pour une poursuite de la baisse de l’EUR/ILS, d’abord en direction des 3,78 qui correspond au point bas de trois mois, avant une attaque du seuil situé à 3,69, un support quasi infranchissable depuis dix ans.

 

 

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