EUR/USD : un revirement de situation inattendu

Post Picture
Post Picture

Publication date

img_tribune_pad_dollar_2

C’est l’effet BCE. L’euro a connu sa plus longue période de hausse continue face au dollar américain depuis dix ans la semaine dernière. Depuis le début de la crise du coronavirus, la monnaie unique était bloquée dans une fourchette large comprise entre 1,07 et 1,12 avec comme point pivot la zone des 1,10. En l’espace de quelques séances, elle a réussi à s’émanciper de la barrière psychologique située à 1,10 et même à franchir la résistance à 1,12. Résultat : en l’espace de cinq séances, l’EURUSD a gagné près de 2,5 %. Du jamais vu depuis de nombreuses années 
Comment expliquer cette appréciation forte et inattendue  ?

Le sentiment des investisseurs à l’égard de la zone euro s’est nettement amélioré en un laps de temps court, à la faveur des différentes mesures dévoilées ces quinze derniers jours. L’Europe, via la Commission européenne, a présenté un plan de relance de 750 milliards d’euros, supérieur au montant envisagé par l’initiative franco-allemande. Ajoutons également que l’Allemagne a adopté un plan de relance national la semaine dernière d’un montant de 130 milliards d’euros, soit environ 3,8 % du PIB incluant parmi les mesures phares une baisse temporaire de la TVA, des mesures de soutien financier pour les secteurs les plus fragiles à partir de septembre, et également près de 50 milliards d’euros d’investissements dans l’e-mobilité.

Dernier moteur d’appréciation de l’euro, et pas des moindres, la BCE a été au rendez-vous jeudi dernier en dévoilant un nouveau bazooka monétaire supérieur aux attentes. Non seulement la banque centrale va augmenter son programme d’achats d’actifs d’urgence face à la pandémie (PEPP) de 600 milliards d’euros, portant l’enveloppe totale du QE (Quantitative Easing, pour programme d’assouplissement quantitatif) à 1300 milliards d’euros, mais le soutien à l’économie va être prolongé jusqu’en juin 2021.

Cerise sur le gâteau, ce soutien perdurera aussi longtemps que nécessaire comme l’a rappelé le communiqué de la BCE : « Dans tous les cas, le Conseil des gouverneurs procédera à des achats nets d'actifs dans le cadre du PEPP jusqu'à ce qu'il juge que la phase de crise du coronavirus soit terminée ». En langage clair, et étant donné que l’impact du coronavirus sera durable (probablement jusqu’en 2022 au moins, selon le Fonds Monétaire International), la BCE risque d’adopter une posture accommodante encore pendant longtemps. En théorie, une banque centrale plus accommodante induit une baisse du taux de change de sa monnaie. Mais, dans le cas présent, les mesures annoncées ont été comprises par les opérateurs de marché comme destinées à soutenir la croissance et ont été jugées extrêmement opportunes.

Enfin, la hausse de l’euro reflète aussi un affaiblissement du dollar américain. Le billet vert est pénalisé à la fois par une diminution généralisée de l’aversion au risque du fait de l’interventionnisme des banques centrales et par les mauvaises performances de l’économie américaine. En l’espace de deux mois, près de 43 millions d’Américains ont perdu leur emploi, contribuant grandement aux tensions sociales exacerbées dans plusieurs grandes villes américaines. À titre de comparaison, c’est l’équivalent de la population active allemande qui serait au chômage. Même si beaucoup d’analystes et d’économistes estiment que l’économie américaine pourrait rebondir plus rapidement que celle de la zone euro, à l’instant présent, les difficultés économiques du géant américain constituent un frein à l’appréciation du dollar américain.

La question qu’on peut se poser désormais est de savoir si l’EURUSD est en mesure d’aller beaucoup plus haut. La phase de hausse a été rapide et inattendue et, comme c’est souvent le cas, cela implique qu’une phase de prise de bénéfices ait lieu. En outre, les moteurs de soutien de l’euro s’épuisent. La BCE a dévoilé toutes ses munitions pour les mois à venir. Quant au plan de relance européen, n’oublions pas qu’il doit faire l’objet d’un vote unanime des pays membres. Déjà, la Finlande l’a clairement rejeté. Le seul levier d’appréciation restant pour l’euro est la baisse du dollar mais qui pourrait vite tourner court si les tensions sino-américaines augmentent rapidement par exemple. Il faudra donc opter pour la plus grande prudence concernant la paire qui devrait expérimenter une volatilité élevée dans les séances à venir et qui n’est pas à l’abri d’une phase de consolidation.

Calendrier économique : 
DATE DEVISE ÉVÉNEMENT
 9 juin USD

Rapport JOLTS sur les nouvelles offres d’emploi aux États-Unis en avril

 4 juin USD

Réunion de la banque centrale américaine (incluant à la fois la mise à jour des projections économiques et la conférence de presse de J. Powell)

 

Cet article de blog ne constitue en aucun cas un conseil en matière d'investissement.

 

Catégories