Scénario catastrophe pour la Russie

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La Russie risque d’être confrontée à un scénario catastrophe. Le pays est durement touché par l’épidémie de coronavirus, tandis que l’effondrement du prix du pétrole se traduit par un trou énorme dans le budget. Cependant, les Russes sont beaucoup plus habitués aux scénarios catastrophes que les Occidentaux.

La Russie est durement touchée par le coronavirus. Le nombre d’infections est probablement beaucoup plus élevé que ce qu’indiquent les chiffres officiels (environ 25 000). Il en va de même pour le nombre de victimes (officiellement 198). Les journaux internationaux citent des sources anonymes dans des hôpitaux de Moscou qui font état d’importantes pénuries de matériel médical. De plus, les médecins indiquent souvent la pneumonie comme cause de décès, afin de ne pas nourrir l’angoisse due au coronavirus. Les conséquences indirectes pour la Russie sont également beaucoup plus importantes que pour la plupart des autres pays. En raison de la chute du prix du pétrole, les recettes publiques de cette année sont plusieurs dizaines de milliards de dollars en deçà des prévisions.

Taux d’intérêt à 17 %

Ce n’est pas la première fois que la Russie est confrontée à l’effondrement des prix du pétrole. Au second semestre 2014, le prix du baril de Brent est passé de près de 110 dollars à un peu plus de 50 dollars. Sur le marché des devises, la demande de roubles (le moyen de paiement du pétrole russe) a chuté soudainement. En un peu plus de six mois, le cours du rouble a diminué de près de 3 cents de dollar pour atteindre moins de 1,5 cents. La banque centrale de Russie a dû augmenter son taux d’intérêt de 7,5 % pour atteindre 17 %, afin d’éviter que le rouble ne perde toute sa valeur. Les hausses de taux d’intérêt sont un moyen éprouvé de donner un coup de pouce à une monnaie. Après tout, n’envisageriez-vous pas de changer de banque si on vous proposait un compte épargne offrant un taux d’intérêt de quelques pour cent de plus ?

La Russie a appris sa leçon

Depuis le début de l’année, le prix du baril de Brent a de nouveau diminué de plus de moitié. Mais, cette fois, la banque centrale ne peut pas se permettre de relever le taux d’intérêt de manière significative. L’inflation en Russie est déjà tombée bien en dessous de l’objectif de 4 %. De plus, une hausse du taux d’intérêt pourrait être le coup de grâce pour l’économie déjà fortement affectée par le coronavirus. Il y a donc de fortes chances que la présidente Elvira Nabiullina annonce une nouvelle baisse du taux lors de la réunion de la banque centrale qui aura lieu le 24 avril. Néanmoins, il reste à voir si le rouble sera à nouveau affecté. En effet, la Russie a tiré de nombreuses leçons de la crise précédente.

L’obstination est payante

La précédente crise pétrolière a coïncidé avec l’introduction de toutes sortes de sanctions internationales contre la Russie, notamment pour l’annexion de la Crimée. Depuis lors, la Russie veut être aussi indépendante que possible du monde extérieur. Seuls 10 % des produits alimentaires sont importés. En 2014, ce chiffre s’élevait à 25 %. Les entreprises ont remboursé leurs dettes internationales à une vitesse fulgurante. Le gouvernement a également constitué une réserve de plus de 100 milliards de dollars. Grâce au caractère isolé de la Russie, le choc commercial international dû au coronavirus se fait beaucoup moins ressentir que dans une économie ouverte comme celle des Pays-Bas. Mais cela ne change rien au fait que le virus est également catastrophique pour la Russie. La différence est que les Russes sont beaucoup plus habitués aux catastrophes que les Occidentaux. Et les leçons qu’ils ont tirées du passé leur permettent maintenant de s’assurer que le cours du rouble ne chutera pas aussi vite qu’on pourrait le penser.

Joost Derks est spécialiste des devises chez iBanFirst. Il a plus de vingt ans d’expérience dans ce domaine. Cet article reflète son opinion et ne constitue en aucun cas un conseil professionnel en matière d’investissement.

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