EUR/CHF : la BNS tient le cap coûte que coûte

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L’euro a atteint un plus bas annuel face au franc suisse à 1,0504 en fin de semaine dernière dans un contexte de plus en plus défavorable à l’appétit au risque. La monnaie unique n’a pas uniquement perdu du terrain face à la devise suisse, elle en a également perdu face aux autres valeurs refuges, le dollar américain et le yen japonais. La hausse du risque géopolitique combinée à la confirmation sans équivoque qu’une reprise en V de l’activité économique, soit une chimère, ont incité les opérateurs de marché à se replier sur les devises jugées sûres.

Les statistiques chinoises pour le mois d’avril, qui servent d’indicateurs avancés pour savoir ce qui attend l’Europe et les États-Unis dans les semaines et les mois à venir, ne sont pas rassurantes. Elles tendent à confirmer que le choc sur la demande reste massif, y compris après que les mesures de confinement ont été levées. Les ventes au détail sont ressorties en recul de -7,5 % en glissement annuel avec une dégringolade à deux chiffres pour de nombreux secteurs comme la restauration ou l’hôtellerie, l’investissement est en retrait de -10,3 % et la production industrielle est, en revanche, en progression de 3,9 %. L’impact du coronavirus sur la demande semble donc être durable tandis que l’offre est en mesure de se rétablir assez rapidement dès que la situation sanitaire s’est embellie.

Si l’on en juge par l’évolution économique en Chine, dès que les mesures de confinement seront pleinement levées dans les pays développés, au plus tard fin juin, il ne faut surtout pas s’attendre à un rebond de la consommation. La normalisation va prendre du temps et il est fort probable que dans un contexte de hausse brutale du taux de chômage, la propension à épargner des ménages augmente substantiellement, particulièrement en France où il s’agit d’un phénomène classique en période d’incertitude élevée. Il s’agit donc d’une mauvaise nouvelle pour tous ceux qui pensaient que la crise du coronavirus serait éphémère. C’est également un signal important pour le marché des changes car plus la crise sera durable, plus cela avantagera les valeurs refuge.

Ajoutons à la crise économique le risque de crise géopolitique puisque les tensions entre Washington et Pékin ne cessent de croître depuis quelques semaines. En l’espace d’une semaine, la Maison Blanche a menacé de couper tous liens avec la Chine et le président Xi Jinping et a également accusé Pékin de pirater la recherche américaine sur un vaccin contre le COVID-19. De plus en plus d’analystes craignent que l’accord commercial signé entre les deux pays en janvier de cette année soit remis en cause et que l’administration Trump, dans la perspective de la campagne présidentielle de cet automne, ne soit incitée à faire monter les tensions afin de créer une forme d’union nationale autour du président. Ce serait une stratégie pertinente puisque, selon un récent sondage, le pourcentage d’Américains ayant une vision défavorable de la Chine a atteint un niveau record, à 66 %. En d’autres termes, si vous voulez gagner les élections américaines de novembre, vous devez adopter une position intransigeante à l’égard de la Chine.

Si, comme nous le croyons, le contexte économique et géopolitique va continuer à se dégrader à moyen terme, cela va compliquer sérieusement la tâche de la Banque nationale suisse (BNS). La semaine passée, le taux plancher à 1,0500 a été attaqué, mais la banque centrale a résisté. Par la voix de son président, Thomas Jordan, elle a réaffirmé publiquement sa détermination à continuer d’intervenir sur le marché des changes afin de limiter l’appréciation du CHF. Sur le seul mois d’avril, la BNS a dû dépenser 40,7 milliards de francs pour faire face à la pression du marché, ce qui a fait chuter ses réserves de change à 800 milliards de francs. Pour l’instant, il est évident que la BNS conserve une marge de manœuvre substantielle pour opérer sur le marché des changes.

Cependant, plus le contexte économique va se dégrader, plus le coût des interventions de la banque centrale va être important. Bien qu’il soit trop tôt pour envisager un scénario similaire à celui de 2015 (lorsque la BNS a brutalement abandonné le taux plancher à 1,20), cette crainte est désormais dans l’esprit de tous les opérateurs de marché. À court terme, nous pensons que la paire EUR/CHF va continuer d’évoluer très proche des 1,05. Un rebond technique vers les 1,0630, qui est la principale résistance de la paire, parait très improbable à ce stade.

Calendrier économique :
DATE DEVISE ÉVÉNEMENT
19 mai EUR

PIB Indice ZEW du sentiment économique en Allemagne

21 mai USD

Indice manufacturier de la Fed de Philadelphie

22 mai EUR

PMI manufacturier en Allemagne

 

 

 

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